Interview / Chédrack Dégbé : « Les livres sont plus sages que leurs auteurs »

Interview / Chédrack Dégbé : « Les livres sont plus sages que leurs auteurs »
Chédrack DEGBE, Délégué à l'Organisation du FESAL

Paroles à un Acteur du Livre. Nous recevons cette semaine sur BENINLIVRES non seulement un communicateur d’entreprise, un enseignant, mais aussi un jeune acteur de la chaine du livre béninois. Gantonho Chédrack DEGBE est né le 10 mars 1988 à Abomey. Il est auteur des recueils de poèmes Pagaie du cœur et Danse d’émotions, il a également collaboré dans la publication de l’Anthologie Rafale de plumes contre la Covid-19.

Interview

BENINLIVRES : « Gantonho » ; « DEGBE » il y a-t-il une philosophie des noms à retenir ?

Chédrack Dégbé : Gantonho = son heure a sonné ; DEGBE = l’enfant qui suit les prescriptions de son père réussit toujours

L’heure a donc sonné. Vous êtes un acteur de la chaine du livre, dites-nous comment se porte le livre béninois ?

Le livre béninois se porte bien. Mais il peut mieux se porter si tous ses acteurs travaillent  un peu plus pour son rayonnement.

Quel est alors l’état de la promotion du livre au Bénin ?

Beaucoup d’initiatives de promotion du livre existent, des festivals du livre, des prix littéraires, beaucoup plus de publications et de lancement de livres que par le passé. Seulement, il manque la politique d’accompagnement  de tous ces efforts par les gouvernants pour que le livre retrouve ses lettres de noblesse.

Personnellement, qu’apportez-vous d’original à cette promotion ?

Nous dirigeons une association de promotion du livre et de la lecture dont je vous présente ici les travaux. 👇

Festival des Samedis des Livres  (FSL)

Collecte des Livres au profit des Elèves du Zou  (CLEZ)

Festival Zou Livres (FEZOL)

Campagne Livres Pour Tous  (CLPT)

Trophée Tous Pour le Livre  (TLPL)

Vous présidez l’association Livres pour Tous (ATPL), quels sont les objectifs de cette association, et quelles sont vos missions?

_ promouvoir le livre et la lecture dans le milieu scolaire et chez les adultes ;

_ donner de la visibilité aux auteurs béninois.

 Pourquoi limitez vos actions au seul département du zou ?

 Nous voudrions bien aller au-delà du département du Zou. On verra bien avec le temps.

Vous êtes le Secrétaire général de la Fédération des Associations d’Ecrivains, Gens de Lettres et Assimilés du Bénin. Que retenir de la mission de cette faitière ?

La FAEGLA accompagne ses associations membres dans la tenue de leurs activités. Notre dernière action d’éclat est la publication de l’Anthologie Rafale de Plumes contre la Covid-19. Nous préparons notre prochaine AG qui sera le tremplin de la redynamisation de la FAEGLA.

Parlez-nous de cette Anthologie ?

L’anthologie Rafale de Plumes contre la Covid-19 est le fruit de la collaboration de 66 auteurs de 9 différents pays. Elle comprend des poèmes, slams, nouvelles, chroniques, fables et même une pièce théâtrale sur la Covid-19. C’est une manière pour les concernés de ne point garder le silence sur la plus grosse actualité de l’année 2020.

Malgré les contraintes, vous avez été  récemment élu au Conseil National des Organisations des Artistes (CNOA) du Bénin où vous occupez le poste d’administrateur. Parlez-nous de cette charge.

Nous sommes 21 délégués représentant les sept filières artistiques du Bénin. Nous aurons à travailler pendant quelques années pour la revalorisation de ces filières que sont la littérature, le théâtre, la danse, la musique, la mode et autres.

 Intéressons-nous à votre secteur, la littérature, vous spécialisez plus dans le genre poétique, quelle est votre perception de l’état actuel de poésie négro-africaine ?

 La poésie en Afrique se porte à merveille selon moi. Je côtoie beaucoup plus les poètes béninois, togolais et camerounais où beaucoup d’efforts sont faits pour la promotion de ce genre, aussi bien l’hermétique ou ce que moi j’appelle la poésie ouverte.

Les thématiques ont-elles évolué? Depuis les précurseurs?

Oui, bien sûr. L’évolution du monde nous fait découvrir de nouvelles réalités. C’est le cas par exemple de la Covid-19.

Deux livres à votre actif. D’abord, « Pagaie du cœur », Que retenir de ce recueil ?

Un recueil de poèmes qui contient beaucoup de poèmes d’amour.

Il y a-t-il un extrait que vous souhaiteriez partagez avec nous ?

 A LA DECOUVERTE DE MA DONZELLE

Entre temps je fis un voyage sur les Seychelles

A ma descente, je rencontrai une moiselle

La pisciforme était belle telle une citadelle

Je l’approchai et contemplai ses prunelles

Devinant mon mal, elle prononça : « Loiselle »

Je demeurai hypnotisé et me sentis en elle

Mon corps figé prit l’allure d’une sentinelle

Je me sentis en cuisson dans une vraie poêle

Ce fut là qu’elle comprit que j’avais kiffé pour elle

Nous laissâmes alors notre destinée au ciel

Et nous nous embrassâmes pêle-mêle

Elle me frotta le corps de ses mamelles

Nous tamponnâmes l’Iles Praslin des Seychelles

Car en elle mon sang ruissela bel

Nous dormîmes en duel sur du sable frêles

Au réveil, je cherchai à tâter Loiselle

Hélas ! Ce fut un rêve, pas du réel.

Chédrack DEGBE

GRÂCE

Scintillante comme une étoile

Tu apparais comme la voix lactée

Ta démarche chaloupée me rend la vue vaporeuse

Ta chevelure rouflaquette me laisse deviner la joliesse de tes joues.

Tes merveilleuses mirettes forment un rival regard qui scie le mien

Tes lèvres sagaces et perspicaces me laissent rêveur

Et de ta généreuse poitrine surnagent deux seins pulpeux que dessine ta chemisette satinée

Qui par sa taille cède une mince partie de ton électronique bas-ventre

Belle et mirobolante Grâce !

Mirifique créature extra-fine !

Ceci n’est ni fleur ni minauderie

Mais plutôt d’ébouriffantes vérités tangiblement authentiques.

Ensuite, Danse d’émotions, pourquoi et comment avez-vous produit ce deuxième recueil de poèmes ?

J’ai voulu transmettre des émotions à travers la publication de ce recueil que j’ai fait de la même manière que le premier.

 Poésie sentimentale,  pourquoi pas révolutionnaire, politiquement engagée comme d’autres poètes ?

Je suis beaucoup plus inspiré à écrire des textes d’amour. Mais qui sait, peut-être qu’un jour les choses pourraient changer.

L’art poétique nourrit-il son homme ?

Pas ici au Bénin en tout cas. Mais ailleurs, les choses évoluent. Dans certains pays africains par exemples les conteurs ont un calendrier de travail sans pause. Ils parcourent des écoles pour des séances de contes. Une organisation des gouvernements qui les payent pour leur job. J’espère qu’un jour on arrivera aussi à cette étape.

Dans l’espérance, dites-nous, quel retour avez-vous de vos lecteurs ?

En toute modestie, mes lecteurs sont suffisamment émus par mes textes d’amour. C’est un objet de satisfaction qui me pousse à continuer.

Quelle est selon vous la mission de l’écrivain dans la société qui est la nôtre aujourd’hui ?

L’écrivain est un objecteur de conscience. Il indique à la société la meilleure voie. C’est d’ailleurs pour ça que les livres sont plus sages que leurs auteurs. On y met ce qui doit être. Et c’est justement pour cela que nous nous battons pour que les lecteurs aillent davantage à la découverte des merveilles que les livres contiennent.

Parlez-nous de vos auteurs et livres préférés, ces plumes qui influencent votre écriture ?

J’aime beaucoup lire Florent COUAO-ZOTTI et Isaïe Biton COULIBALY pour la finesse de leur plume toujours teinté d’un brin d’humour. J’adore également la trop grande liberté de la plume de Florent Eustache HESSOU.

Par Richard ADODJEVO, ©BENINLIVRES