Erroce Yanclo est un jeune auteur du Bénin qui, vaille que vaille, bâtit avec soin et application son parcours professionnel. Il est arrivé 2ème au concours national Grand Prix du lecteur lors des Rencontres internationales du livre du Bénin – Beninlivres (Cotonou, du 25 au 28 septembre 2019). Le vendredi 29 novembre 2019, Erroce, est de nouveau distingué en remportant le Prix Ecrivains Humanistes du Bénin, pour sa nouvelle Le rêve mal né. Il nous parle de ce dernier sacre.
Interview
Radio Beninlivres : Vous avez remporté, le vendredi 29 novembre 2019, le Prix Ecrivains Humanistes du Bénin pour votre nouvelle Le rêve mal né. Comment en êtes – vous venu à ce sacre ?
Erroce Yanclo : Effectivement, c’est connu depuis vendredi dernier 29 novembre 2019 que c’est la personne d’Erroce Yanclo qui a eu l’honneur de succéder à mes très chers aînés Djamile Mama Gao et Yves Biaou dans le cadre de la cinquième édition du Prix Ecrivains Humanistes du Bénin.
Le programme « Le livre contre les maux de la cité » porté par l’Association des Ecrivains Humanistes se veut une série d’actions de détection des maux de la cité, afin d’éradiquer ces maux à travers de jeunes plumes engagées. Le parcours de cette édition a été de taille, avec en compétition quatre (04) pays : le Bénin, le Togo, le Niger et la Côte d’Ivoire.
Déjà à ma découverte du programme dont la thématique de cette année portait sur « l’émigration clandestine vue par les jeunes auteurs ouest africains », j’ai su que j’avais mon mot à dire. Partant de témoignages et de faits dont j’ai été témoin ; en complicité avec mon inspiration, je me suis mis dans la peau d’un jeune candidat à l’émigration clandestine et ai produit une nouvelle. Mon texte, d’abord finaliste a connu une réécriture après un atelier d’écriture de trois (03) jours puis a été sacré texte lauréat à l’issue de la délibération finale.
Je suis fier de cette aventure et de ce sacre ; et suis aussi bien comblé d’avoir eu à mes côtés dans cette aventure d’autres jeunes et belles plumes du Bénin et de la sous-région. C’est la preuve que vous lirez dans ce recueil collectif de nouvelles des textes bien inspirés et assez porteurs de messages.
Parlez – nous de la nouvelle primée
La nouvelle éponyme de ce recueil est intitulé « Un rêve mal né ». Elle raconte l’histoire de deux jeunes gens rêvant d’Europe et de conditions de vie améliorées, qui ont décidé de se jeter dans le vide de l’émigration clandestine, sans préparation et sans forcément l’assentiment des leurs. Ignorant les risques de cette aventure dont peu à peu ils ont eu à faire face, ils se sont rendu compte des velléités que renfermait ce départ mal préparé. Ce texte ne décourage pas l’émigration clandestine –puisque toute émigration n’a pas forcément que des impacts négatifs-, mais cherche surtout à sensibiliser les jeunes, candidats à l’émigration clandestine des risques encourus dans un tel projet. Ce texte regorge d’une forte dose de sensibilité et de questionnements, parce que tout part de là. D’autres sentiments et vécus sont également perceptibles le long de l’histoire.
En dehors du thème principal, quels autres sujets avez – vous abordés dans votre fiction ?

Mon manuscrit, pour répondre à la thématique de cette cinquième édition dénonce l’émigration clandestine (pas dans une dynamique de condamnation). J’y dénonce également la porosité de nos frontières, la recherche d’une vie facile en comparaison à celle des autres, la faible volonté politique face au chômage des jeunes et aussi l’inactivité de la couche juvénile quêtant toute manne de la part de l’Etat.
Comment avez – vous traité ces thématiques / maux ?
La considération de ces maux pour moi a été traitée par la promotion de valeurs. Certes dans une dynamique d’écriture de sensibilisation aux risques liés à l’émigration clandestine, je partage aussi dans mon texte des valeurs telles que l’amitié, la sensibilité à la famille, la solidarité, l’optimisme et la témérité. Je suis par ailleurs resté dans une démarche de fidélité aux témoignages des uns et des autres, candidats heureux ou malheureux à l’émigration clandestine.
Comment votre oeuvre luttera contre les maux de la cité si on sait que, dans la cité tout le monde n’a pas encore accès au livre? Autrement dit, êtes – vous convaincu que par la littérature, on peut guérir les maux de la société?
Je suis convaincu que le livre est un levier de développement et je le prône partout où l’occasion m’est offerte. Je suis de ceux qui pensent que lire devrait être considéré comme un besoin vital et à ce titre la lecture devrait être démystifiée. Le livre guérira inévitablement les maux de la cité dans la mesure où la lecture sera rendue accessible à tous.
Avons-nous donc l’obligation d’enseigner les jeunes générations (élèves et étudiants) à un amour pour la lecture comme leur part au développement de la nation. Le livre doit également être rendu accessible à d’autres couches sociales en allant vers eux et en prenant en compte leurs réalités propres. Comme j’aime si bien le caricaturer, de la vendeuse de bouillie de mon quartier, passant par l’apprenti vulcanisateur, allant aux conducteurs de taxis-motos et au parent villageois le plus analphabète ; tous ont besoin de savoir que le livre peut éradiquer les maux de la cité.
Je n’ai pas la prétention de résoudre juste à travers ma parution tous les risques liées à l’émigration clandestine, qui est la thématique qu’illustre le présent collectif de nouvelles, mais je suis convaincu que mon texte ainsi que tous les autres textes finalistes contribueront désormais à amener les candidats au départ, à se rendre compte des risques qui s’échelonnent le long du parcours de l’émigration.
Réalisation : Par Esckil AGBO, ©Beninlivres, décembre 2019