[Cinéma / Tu mourras à 20 ans] : Chronique religieuse – drame sociétal

[Cinéma / Tu mourras à 20 ans] : Chronique religieuse – drame sociétal

Tu mets au monde ton 1er enfant. Le jour de son baptême, le Responsable religieux te  dit qu’il  mourra à 20 ans. Oh, quelle terrible prophétie ! Une mort programmée ! La nouvelle se répand, telle une trainée  de poudre dans  le village. Ton ”gamin”  devient « le fils de la mort », pour tous et pour toutes. Que ferais – tu ?


Et bien, c’est ce qui est arrivé au jeune couple Sakina et Alnoor.  Au cours du baptême de  Mozamil, leur bébé, l’un des servants du Chef religieux perd connaissance et tombe. Alors que la cérémonie  était à une étape très importante. Mauvais signe ! Un malheur s’abattra sur la jeune famille. A  l’âge de 20 ans, le nouveau – né  mourra. Le cheikh dit sa prophétie et congédie les jeunes parents – tout anxieux. Ne pouvant supporter la situation, Alnoor, le père, quitte la concession et  va en aventure,  abandonnant  ainsi  son épouse et son garçon. Mozamil et sa  maman devront affronter, seuls, les médisances, les commérages et les moqueries du village.  

Nous sommes à  Aljazira, une province du Soudan. Des années passèrent et Alnoor ne revenait toujours pas. Ses vingt ans  arrivent à grand pas et, Mozamil souffre toujours de l’absence de son père. Un père qui ne l’a vu qu’à sa naissance. Terrifié, le garçon n’attend que sa mort prochaine.  Il n’attend que ses 20 ans pour mourir. Tout, en lui, sent la mort aux yeux des  habitants du  village  et  même à ses propres yeux.   «  Est-ce que le temps dans ton ventre compte dans ma durée de vie ? », « Comment-a-t-il a dit que je mourrai ? », demanda- t – il, une nuit  à sa mère.

«Tu  mourras à 20 ans »  est un film du Soudanais Amjad Abu Alala. C’est un long métrage (105 min) – produit en 2019, Prix FIPRESCI (Fédération Internationale de Critiques de Films) à la 30ème édition des Journées cinématographiques de Carthage – JCC 2019.

Le scénario est  une co- écriture  du Réalisateur  soudanais et du Scénariste Yousef Ibrahim. La narration est forte. Sa construction  produit d’intenses effets sur le cinéphile. Avec de la rhétorique très impressionnante, maintenant le destinataire dans l’attente d’un dénouement, qui peut – être, n’arrivera jamais.  

Comme thématiques, il faut retenir, sans être exhaustif, la religion, le poids de la religion,  l’exil, la croyance religieuse, l’amour, la fornication, l’alcoolisme, l’éducation.  Tout ceci, développé dans   un langage filmique très élevé.  Par des images  de haute qualité,  une musique qui émeut   et un jeu d’acteurs qui donne de fortes sensations. Réaliste mais aussi philosophique « Tu  mourras à 20 ans » interroge la vie, la religion et la croyance. C’est une œuvre qui met chaque personne devant ses responsabilités face aux événements de la vie. Elle travaille l’absurdité pour provoquer l’intelligence.

Esckil AGBO, / ©Beninlivres, Tunis octobre   2019