Euphrasie Calmont est une Ecrivaine martiniquaise d’origine béninoise. Auteure de plusieurs ouvrages, elle rend hommage à son ” doyen” Olympe Bhêly Quenum qui célèbre les noces de diamant de son roman Un piège sans fin, paru pour la 1re fois le 15 avril 1960, aux éditions du Stock. C’est à travers un beau poème intitulé « Les palétuviers ».
Lisez
Les palétuviers
Il est des gens comme ça.
On les croise un jour,
Ou à un moment de son parcours,
Sans les connaître autrement que sur papier.
Puis, c’est comme si on les croisait dans une rue.
Et tilt ! on se retourne.
Et paf ! ils se retournent aussi.
*
Les regards se croisent.
Des étincelles s’emparent de vos prunelles.
Une allégresse entre en vous.
Votre corps, votre âme et votre esprit
Sont ainsi plongés dans un liquide amniotique.
Et ces gens-là vous nourrissent toute votre vie.
Une sorte de cordon ombilical discret
Vous lie à eux sans qu’ils le sachent,
Sans que vous arriviez à déchiffrer vous-mêmes
Le « pourquoi », le « comment ».
Olympe Bhêly-Quenum fait partie de ces gens-là.
*
Vous voulez savoir pourquoi, ou comment,
N’est-ce pas ?
C’est simple.
J’ai été abreuvée de dictées extraites
Des livres d’Olympe Bhêly-Quenum.
Longtemps, pendant longtemps,
Je n’ai jamais pu voir un palétuvier,
Sans que mon cœur vibre.
Et jusqu’à présent, de temps en temps encore,
Cette joie me surprend dans la mangrove
Au bord du lac Ahémé, du lac Nokoué, du fleuveOuémé,
Ou dans les recoins de la mer des Caraïbes.
*
Cela est dû à Olympe Bhêly-Quenum.
Mon cœur si douillet a trop vibré à la lecture d’Un piège sans fin.
Lisez, lisez Un piège sans fin, Le chant du lac, Liaison d’un été …
Vous comprendrez comment des palétuviers
Peuvent laisser des marques indélébiles.
Ah ! le long des palétuviers !
Oh ! « …palétuviers…plaisanteries…charades… »[1] !
Et si pour vous, ce ne sont pas des palétuviers,
Ce sera certainement une scène…
*
Vous verrez combien les mots sont choisis,
Tissés de fil d’or pour un défilé,
Et la lecture devient une fête.
*
A Olympe Bhêly-Quenum
Je dis ma fierté, ma gratitude.
Owo !
Alouwassio !
Owo !
Owo !
Je chante Olympe Bhêly-Quenum.
Par Euphrasie CALMONT, ©BENINLIVRES, avril 2020
[1]Olympe Bhêly-Quenum, Le Chant du lac, éditions Présence africaine, 1965, page 12.